OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Lex Google pour les nuls http://owni.fr/2012/10/24/la-taxe-google-pour-les-nuls/ http://owni.fr/2012/10/24/la-taxe-google-pour-les-nuls/#comments Wed, 24 Oct 2012 11:23:45 +0000 Andréa Fradin http://owni.fr/?p=123977

Parole contre parole, troll contre troll. La lutte entre certains éditeurs de presse français, Laurent Joffrin en tête, et Google, autour d’un projet visant à faire payer ce dernier dès qu’il colle un lien vers des articles, a connu son lot de diatribes et d’envolées lyriques. “Censure”, “menace” : au-delà des gros mots, difficile de toucher le fond. Rien ou trop peu a été dit sur les modalités d’un tel dispositif : concrètement, on fait comment ? Le point avec Cédric Manara, spécialiste des questions juridiques touchant à Internet et à la propriété intellectuelle.

Et tu références-rences-rences le contenu qu’il te plaît

Premier constat, qui s’est imposé assez rapidement : en l’état, rien ne peut forcer Google à référencer un contenu, pour l’obliger dans un second temps à payer pour le faire.

Autrement dit, si le projet de loi des éditeurs de presse venait à s’imposer en France, le géant américain aurait toujours la possibilité de bifurquer : choisir d’arrêter de signaler dans ses services (Google Actu, moteur de recherche classique) les contenus qui l’obligeraient à payer en favorisant ceux en provenance des blogs, des forums, de l’étranger… Bref, tout ceux placés en dehors du radar de la loi. Et oui, c’est ballot, Internet n’est pas français, mais mondial.

Google se paie la presse

Google se paie la presse

C'est la guerre ! Face au projet de loi de certains éditeurs de presse qui souhaitent faire payer Google dès qu'il ...

L’absence d’un tel levier pourrait expliquer la faiblesse des argumentaires, qui titillent aujourd’hui avant tout la fibre morale de Google. “La multinationale américaine, qui se targue de remplir une tâche d’intérêt général grâce à son moteur de recherche, vient de démontrer qu’elle se soucie comme d’une guigne du droit à l’information”, proclamait par exemple le tribun Joffrin, en fin de semaine dernière.

Une stratégie de la terre brûlée qui pourrait néanmoins s’avérer payante : si aucun outil juridique ne menace Google, son image d’orchestrateur sympa de la connaissance, savamment construite au fil des années, risque d’être écornée en France. On comprend mieux alors pourquoi Laurent Joffrin ou son acolyte Nathalie Collin, à la tête de l’association d’information politique et générale (IPG) qui a remis le texte aux ministères, ont choisi de mener l’affaire sur la place publique au lieu de jouer profil bas, comme il est normalement d’usage dans de telles opérations de lobbying. Quitte à exposer au grand jour la proximité des patrons de presse avec le pouvoir en place.

Mais l’image de Google ne sera pas seule déterminante. “Le business va aussi la décider”, poursuit le juriste.

Si Google estime qu’il y a un appauvrissement de ses services, et qu’il veut davantage que le contenu gratuit, ou si des gens quittent Google News par exemple, alors ils pourraient changer de politique. Et réindexer les contenus payants. On peut même imaginer qu’ils changent souvent de politique : un jour ils indexent, l’autre non, etc.

Admettons

Dans l’hypothèse où Google accepterait de se soumettre à un tel dispositif, une véritable machine à gaz verrait alors le jour. Avec son lot de questions. Et d’absurdités.

Dans son projet, la presse s’inspire des industries culturelles. A commencer par la création d’une extension du droit d’auteur, un droit “voisin”. Le problème, souligne Cédric Manara, c’est que ce nouveau droit, inventé à l’origine “pour récompenser ceux qui soutiennent les créateurs”, viendrait s’appliquer à des choses déjà protégées par le droit d’auteur. Une option qui fait bondir notre juriste.

C’est la création d’un droit qui protège les sociétés de presse. Même si elles publient trois ou quatre lignes sur n’importe quelle actualité, elles sont de fait protégées. Non pas pour leur contenu, mais en leur qualité d’organisme de presse. C’est la création d’un droit équivalent au système de l’Ancien régime, la création d’un privilège. Pourquoi protéger un organisme de presse plutôt que d’autres contenus ? C’est un problème. Et si c’est ça la politique actuelle à l’heure du débat sur la propriété intellectuelle à l’heure du numérique, alors ce n’est pas bon signe.

Avec un tel dispositif, Internet se verrait donc administrer une bonne dose de verticalité : les articles produits par des organismes de presse reconnus bénéficieraient d’une valeur différente de celle des autres contenus, libres. Mieux, seul le haut du panier de la presse bénéficierait pleinement de ce nouveau droit.

Car pour traiter avec Google et collecter les sommes associées aux articles signalés par le géant américain, une société de gestion collective verrait aussi le jour.

A en croire le projet de loi de l’IPG, révélé par Télérama, les éditeurs de presse seraient favorables à “une rémunération équitable forfaitaire”, “calculée en prenant en considération des enquêtes et des sondages, notamment sur le comportement des internautes à l’égard de ces liens.” “Par exemple, ils peuvent dire que le taux de clic devrait valoir telle somme par rapport à tel usage”, complète Cédric Manara. Et d’ajouter :

La boîte noire de ce dispositif, c’est la répartition. En l’état, cet enjeu est noyé dans le projet. Or on connaît les travers des sociétés de répartition déjà existantes, dans lesquelles le traitement est inégalitaire.

La clé de cette répartition serait à chercher du côté de la composition du conseil d’administration de la société. “Cela consistera à donner un pouvoir à ceux qui auront trusté les mécanismes de la société de gestion”.

Faut-il encore que le rêve des éditeurs de presse de l’IPG s’accomplisse. Et sur ce point, c’est pas gagné. Si Aurélie Filippetti semble y être favorable, du côté de Bercy en revanche, on semble beaucoup moins chaud. “C’est une des pistes étudiées”, nous indique-t-on là bas. “On ne trouvera pas la solution en deux jours”. La prudence serait donc de nouveau de miser sur ce dossier qui a déjà fait la preuve de son explosivité. Que reste-t-il alors aux éditeurs de presse ?

L’un des scénarios serait de viser Google sur le terrain économique. Une option qui serait sérieusement envisagée du côté du ministère du redressement productif. Interrogé par Owni, ce dernier s’est abstenu de tout commentaire. Le principe est simple : saisir l’Autorité de la concurrence pour abus de position dominante. L’issue elle, est bien moins certaine.

“Google est une plate-forme, elle ne produit pas d’articles donc on pourrait conclure qu’elle ne cause pas de tort aux éditeurs de presse, songe Cédric Manara. Ceci étant dit, il est possible de sanctionner une entreprise qui utiliserait sa position sur un marché A pour agir sur un marché B. Mais là encore, Google n’est pas sur le marché de la presse et ne devrait pas y venir…”

Copiepresse vs Google: de l’index au majeur

Copiepresse vs Google: de l’index au majeur

La décision de Google de désindexer les médias belges francophones a provoqué un vif débat sur la relation entre la ...

David contre Goliath

L’équation est d’autant plus difficile à résoudre qu’il n’y a aucun précédent du genre en France. L’Autorité irait sans doute étudier les autres cas de figure, en Belgique ou encore au Brésil, où les éditeurs de presse se sont également frottés à Google News.

Si ce dernier mettait ses menaces à exécution, en déréférençant les articles français, les journaux pourraient aussi choisir de s’attaquer seuls au colosse du web devant un tribunal de commerce. Au motif que l’action de Google fait baisser leur chiffre d’affaires. Mais là encore, difficile de savoir l’impact réel des services.

Dans un article dénonçant le “flou” de cette guerre d’un nouveau genre, Arrêt sur images écrit que la “la bataille des chiffres est ouverte. Dans un papier consacré au sujet, Lemonde.fr affirme que seulement 5% de son trafic provient d’une recherche Google, Lenouvelobs.com déclare une fourchette comprise entre 20 et 25%, avec environ 50% pour LePlus, la partie participative du site. Quant au figaro.fr, le premier site d’information français, il refuse de communiquer le moindre pourcentage. Il ne fait pas toujours bon afficher sa dépendance à Google”, conclue le site d’informations, qui estime quant à lui que 27% de ses visites le mois dernier provient des moteurs de recherche, “dont plus de 90% en provenance de Google.”

Reste l’option d’une attaque pour violation de droits d’auteur. C’est l’option prise en 2005 par l’Agence France Presse (AFP), ou en 2007 par la société Copie presse, en Belgique. Des actions qui se sont finies par un accord commercial, dont il est difficile de connaître les termes. “On peut imaginer des accords sans contrepartie financière, ou même que les journaux paient pour avoir une bonne place sur Google, explique Cédric Manara. Beaucoup paient pour avoir des adwords, on pourrait penser qu’ils paient directement pour être bien référencés !”

Reste un problème, de taille : Google est un véritable ogre juridique. Capable de faire durer les bras de fer devant les différents tribunaux. Et de porter les affaires devant les instances européennes. Difficile donc pour les rédactions d’aller affronter Goliath, seules avec leurs petits poings. Mieux vaut se tourner vers un autre géant : l’Etat français.


Illustrations par Loguy pour Owni /-)

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Le référencement tourne au vinaigre http://owni.fr/2011/09/12/le-referencement-tourne-au-vinaigre/ http://owni.fr/2011/09/12/le-referencement-tourne-au-vinaigre/#comments Mon, 12 Sep 2011 06:07:57 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=78444 Dans un échange de courriels avec OWNI, l’investisseur du web Jérémie Berrebi a confirmé sa décision de faire appel d’un jugement du 26 juillet dernier du Tribunal de commerce de Paris. Depuis plusieurs mois, ce dossier atypique passionne le petit commerce de l’indexation sur Google. Le 26 juillet, l’une des sociétés de Berrebi, zlio.com, a été condamnée à payer une facture non-réglée à referencement.com, chiffrée à 17.000 €.


Mais dans son jugement, le tribunal a également sanctionné l’homme d’affaires pour s’être emporté, dans un tweet, en exprimant tout le mal qu’il pensait de son ancien prestataire. Conséquence : 10.000 € de dommages et intérêts à verser à referencement.com pour “dénigrement”.

61039959 Con Damnation de La Societe Zlio

L’affaire remonte à septembre 2007, lorsque les gérants de zlio.com constatent une brutale dégradation dans l’indexation de leur site sur Google. Ils font alors appel à referencement.com, société spécialisée dans le placement des sites sur les moteurs de recherches . Et donc chargée de faire remonter les pages du site de boutiques en ligne.

Selon un porte-parole de Google, qui a insisté pour que son nom ne soit pas cité, un site peut être déréférencé – manipulation temporaire et définie dans le temps par les équipes techniques de Google et/ou action de l’algorithme – ou peut perdre en visibilité :

Cette intervention peut arriver lorsque les sites ne sont pas pertinents, voire s’ils sont malveillants. Dans la majorité des cas, le propriétaire du site reçoit une ou plusieurs notification en amont. Sauf pour les sites en infractions répétées.

L’action n’étant pas irréversible, même pour les sites qui ne respectent pas les CGU, referencement.com avait pour mission de rendre à zlio.com sa visibilité première. Avec un budget important d’environ 30 000 euros, une belle somme pour l’époque et la problématique. Mais quelques mois plus tard, les associés du site lésé remarquent que la mission de leur prestataire n’est pas à la hauteur de leurs attentes. Et décident de ne pas verser les 17 000 euros restant à l’ardoise correspondant au paiement à livraison pour “inexécution des engagements”. Un proche avance l’existence d’un mail, intégré au dossier et expliquant que la deuxième partie de la facture “ne serait versée qu’en cas de résultats satisfaisants de referencement.com”.

Un ancien développeur de referencement.com nuance les performances des sociétés de ce type :

Au royaume du SEO (optimisation de l’indexation, Ndlr), le résultat du référencement naturel n’est jamais garanti à 100%. Il est toujours possible de garantir de travailler les critères on-site, soit ce qui concerne le référencement dans les pages même du site, respectant ce que pourrait souhaiter l’algorithme de Google. Mais pour les critères off-site, ce qui peut représenter environ 70 à 80% de la proportion de prise en compte, nous ne maîtrisons pas vraiment les choses.

Son dû en attente et quelques rappels envoyés à Zlio – restés sans réponse -, Sylvain Bellaïche, président de referencement.com, décide d’assigner son client au Tribunal de Commerce de Paris pour non paiement de la prestation, le 30 janvier 2009.

140 signes pour une jurisprudence

Mais si le juge statue en faveur du prestataire, dans la balance judiciaire, il n’y a pas qu’un simple refus de paiement de la part de Zlio. Est aussi apparu au cours de la procédure un tweet de Jérémie Berrebi sur son compte Twitter personnel, contre les performances de referencement.com. C’est la première fois en France qu’une condamnation est prononcée contre l’auteur d’un tweet.

L’avocate de referencement.com, Me Sylvie Gauthier refuse de s’exprimer sur le sujet. Et celui de Zlio, Jean-Philippe Hugot explique que “la motivation du tribunal est incompréhensible, surtout concernant la diffamation.” Pour lui, le tribunal de commerce ne peut pas juger d’une diffamation.

Cependant, pour Me Gérard Haas, spécialiste des questions concernant le droit et Internet, le tribunal de commerce est compétent pour juger ce genre d’affaires :

Un tribunal de commerce est plus au fait des relations entre commerçants qu’un autre tribunal et la condamnation a encore plus de de poids dans le cas de dénigrement. La décision de condamner un tweet diffamatoire est intéressante pour le futur de la e-reputation : on est responsable de ses tweets.


L’affaire, qui sera donc réexaminée en appel, est emblématique de la forte concurrence à laquelle sont confrontés les sites pour atteindre les résultats des premières pages de Google. Les simples désaccords entre commerçants du net deviennent des batailles rangées. Un phénomène qui devrait prendre de l’ampleur avec le nouvel algorithme de Google, déployé il y a un mois, et qui bouleverse les règles de l’indexation pour plusieurs secteurs économiques.

Illustration Paternité woodleywonderworks

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Copiepresse vs Google: de l’index au majeur http://owni.fr/2011/07/18/copiepresse-vs-google-de-l%e2%80%99index-au-majeur/ http://owni.fr/2011/07/18/copiepresse-vs-google-de-l%e2%80%99index-au-majeur/#comments Mon, 18 Jul 2011 15:24:35 +0000 Damien Van Achter http://owni.fr/?p=73959 Ce billet a été initialement écrit sur Google+. Afin d’ouvrir la discussion à ceux qui ne sont pas encore présents sur cette plate-forme (et d’en conserver une trace, #justincase), je le retranscrits ici avec ses commentaires, dont la qualité est vraiment assez remarquable. N’hésitez pas à poursuivre la discussion ci-dessous. (Tx @ Damien Spleeters pour la suggestion)

Le conflit entre Google et les éditeurs belges francophones, représentés par Copiepresse, a connu vendredi une nouvelle péripétie avec la désindexation des sites de ces médias du moteur de recherche. Ce comportement (qui ne fait qu’appliquer – avec une dose certaine de cynisme – le jugement prononcé en défaveur de Google et dont Copiepresse espère toujours qu’il fera jurisprudence) renforce un bras de fer économique, technique et même, à mes yeux, philosophique, entamé en 2006.

Pour vous rafraichir la cache (mwouarf !…désolé), voici une série de 20 articles que j’avais publiés à l’époque où je couvrais le procès, notamment pour le compte de l’agence Belga. Étonnant de voir qu’en 5 ans, les arguments sont toujours les mêmes…. et que le schmilblick n’a in fine pas avancé d’un iota.

[MàJ - lundi, 18h15 : Une solution vient d'être trouvée entre Copiepresse et Google qui va réindexer les sites de presse.]

Commentaires

Pascal Alberty - J’ai beau entendre des arguments dans tous les sens, j’ai toujours la même petite phrase qui me revient dans la tête “le beurre, l’argent du beurre … et les miches de la crémière”. Je sais, c’est réducteur, mais le scénario de ce qui s’est passé aujourd’hui n’a-t-il pas été écrit par CopiePresse elle même ?

François Schreuer - Ce qui est étonnant, c’est que Google ait attendu aussi longtemps avant de prendre cette décision qui a le mérite de placer les éditeurs devant leurs contradictions. Parce que, personnellement, je ne vois guère de différence entre Google News et un moteur de recherche quand on sait un peu s’en servir…

Pascal Alberty – @François Schreuer pour une explication (un peu technique il est vrai) voir la vidéo de Philippe Laloux. En gros, l’explication de Google provient du fait du changement de son algorithme qui lie beaucoup plus le fonctionnement de Google News à Google Search. De ce fait, retirer du contenu de Google News (ordonné par le jugement) provoque le retrait de Google Search. “Comme par hasard” dirait les responsable de CopiePresse.

Cédric Motte – Ah ben voilà, un historique intéressant ! Tout lu. Et je n’ai pas de réponse ;o) mais on se rejoint sur la question de fond quasi philosophique, développé sur le post de Christophe Lefevre tout à l’heure : en tant qu’éditeur, je dois avoir la possibilité de demander à Google de retirer un contenu que j’ai publié. Dans l’absolu, c’est aussi débile que Coca qui souhaite se retirer de Carrefour. Mais c’est un droit, me semble-t-il, quand le distributeur est identifié et gagne de l’argent grâce à ce que je produis, de décider de ne plus lui donner accès à mes produits. Et si Google était en opt-in sur Google News et son cache, il est fort probable que les éditeurs eussent agi différemment !

Protocole de désindexation

Benoît Marchal - Mais ce droit tous les éditeurs l’ont ! Il y a même un protocole Internet qui est défini pour communiquer ce droit. Le fond de l’affaire c’est que les éditeurs ne veulent pas mettre en œuvre les normes techniques définies sur Internet. Et un juge leur a donné raison, mais on est dans un pays où quand un type se fait braquer on lui répond qu’il devait acheter une voiture moins voyante…

François Schreuer - @Pascal, oui, j’ai lu ça quelque part. Cela dit, les contraintes techniques servent souvent à masquer des choix politiques.

Pascal Alberty – @Cédric Motte : c’est possible pour un éditeur de ne pas faire indexer tel ou tel contenu ! Mais c’est aussi le but de l’éditeur d’avoir beaucoup de contenu indexé pour générer du trafic à partir des recherches naturelles… (d’ailleurs ces mêmes éditeurs ne se privent pas de faire du contenu pour faire du contenu dans ce but unique, même au détriment de la pertinence du contenu et de l’intérêt des lecteurs) : “le beurre et l’argent du beurre”… Même si je reconnais qu’il y a des droits d’auteur et tout le toutim, c’est délicat de dire d’un côté “on ne veut pas que Google se fasse de l’argent en stockant nos articles dans Google News” et de l’autre côté “on veut bien quand même que Google nous amène du trafic comme ça nos annonceurs seront contents”. A nouveau, je suis un peu réducteur, mais c’est tout de même un peu le nœud du problème.

Cédric Motte - [Je ne parlerais pas forcément de Google News, parce que c'est effectivement un autre problème - il ne s'agit que de citation dans Google News, là où l'on parle de copy paste pour le cache.] Pour le cache, donc, merci de vos précisions, je sais qu’il y a tout ce qu’il faut techniquement pour bloquer l’indexation, notamment pour ne pas apparaitre dans le cache.

@Benoît Marchal, l’exemple que tu donnes sur la voiture va justement dans le sens de copiepresse, il me semble. J’ai le droit de publier ce que je veux, et un jour je peux avoir une belle voiture, un autre une voiture pourrave, mais dans tous les cas c’est moi qui dois etre en position de décider, pas les éventuels mecs qui vont te piquer ce qui est en ta possession.

@Pascal Alberty je ne suis pas sûr de voir en quoi c’est délicat. Ce qui me gêne dans l’histoire, c’est que la réutilisation du contenu est très bien gérée en ligne par la notion de licence CC. Il s’agit alors d’un choix déclaratif et non d’une contrainte technique imposée par l’un des acteurs de mon circuit de distribution. Google me fait penser aux ouvriers du livre en France, tiens ! Un peu gamins, voulant imposer leurs règles… L’ensemble des textes, photos et vidéos que je pousse en ligne sont en licence CC, donc je n’ai pas de problème de fond sur le partage de contenu :-) !

Plus loin, et plus largement, il y a peut être quelque chose de gênant dans tout cela. En intervenant à ce point à la main sur l’index, Google devient éditeur de contenu . S’ils s’étaient contentés de ne suivre que la décision de justice, alors pas de souci, ils restent dans leur rôle d’hébergeur. Non ? Désolé c’est alambiqué comme réponse.

fabrice massin – J’en profite donc pour rappeler à tous que ces mêmes éditeurs ont aussi entamé une action en justice pour que le service public arrête de faire des sites internet (en fait on devrait juste plus faire de textes ni mettre de photos… plus de site quoi), arrête d’être présent sur FB, sur Twitter, arrête les newsletters… Bref disparaisse du web pour leur laisser la place.

Benoît Marchal – Sur l’affaire Copiepresse tu n’as pas l’air bien au fait du fond. Les faits sont les suivants : depuis plus de 15 ans il existe un moyen technique très simple pour demander non seulement à Google mais à tous les moteurs de ne pas indexer un site ou de ne pas citer un extrait du site dans les résultats. Un webmestre bourré le met en place en 15 minutes (c’est ce qu’explique Pascal Alberty). Il est essentiel de comprendre deux choses :

  1. Ca répond parfaitement à ce droit fondamental sur lequel nous sommes d’accord et que Google n’a jamais violé : c’est à l’éditeur de choisir ce qui sera repris dans l’index
  2. La communauté Internet a élaboré un protocole c’est à dire un mode de travail commun. Il est évident que dans une communauté si on ne respecte pas quelques règles communes c’est invivable (en droit on parle d’us et de coutume).

Fondamentalement le procès gagné par Copiepresse, c’est que la presse belge obtient le droit de ne pas respecter le protocole Internet. C’est donc la presse belge qui dit à l’ensemble de la communauté Internet du monde entier “nous on veut pas travailler avec vous.” J’aurais envie de dire qu’ils restent sur le papier et qu’ils ferment leurs sites…

Déconnexion (de la réalité)

Francois Lamotte - On avait un épisode de PodCafé à l’association des journalistes professionnels sur ce sujet là : je n’ai pas mes archives sous la main mais je pense qu’on avait abordé ce qui s’est passé ce vendredi. Quand on relit les déclarations des différents intervenants des “victimes” de ce vendredi (Philippe Laloux, M Boribond, …), cela confirme ce que Benoît Marchal dit : ce conglomérat vit sur sa planète. Ils imaginent qu’ils sont sur une île perdue dans l’océan. Ils ont toujours une mentalité de broadcasteurs qui fondamentalement méprise son environnement (ses lecteurs etc). Mais la réalité est un écosystème avec différents modes d’interactions entre les ensembles. Reprenons l’image des vases communiquants, ce qui passe d’un coté revient d’un autre.

Ils minimisent l’impact du trafic “gratuit” offert par Google (le trafic organique venant de Google). Mais 30 à 40% de visiteurs gratuitement obtenus, cela représente 30 à 40% du chiffre d’affaire publicitaire réalisés par ces journaux. Voir plus si ces segments de visiteurs passent en moyenne plus de temps sur leurs site. Franchement si j’ai un “partenaire” qui est responsable au minimum du tiers de mes revenus, je le traiterai autrement que de simple “voleur”.

Les chiffres du CIM nous montreront rapidement s’ils veulent entendre raison… Parions que dans quelques semaines un accord sera obtenu et que certains acteurs mangeront leur chapeau, leur chemise et leurs arguties jusqu’ici défendues.

Christophe Lefevre - Assez d’accord avec Benoit Marchal. On ne peut pas imposer à Google de suivre les règles de la presse sans accepter de suivre celle du web. Et Google n’est pas un service à la carte, c’est comme si je un journaliste m’interviewait et que je lui répondais que je veux choisir l’emplacement de l’article sur le journal, que je veux qu’ils oublient mon nom après publication… Chacun son métier et à chacun ses intérêts ! La semaine prochaine, je dois travailler sur une solution pour indexer des articles qui ne se publient pas encore dans Google News : ben oui, chez RTL.be, on aime bien Google !

Erwann Gaucher - Au moment où de plus en plus d’éditeurs affirment vouloir les faire plier, Google a voulu faire un exemple avec les sites belges. Cela prouve que, pour le moment, ce n’est pas via la loi que l’on peut faire plier Google, mais en les battant sur le terrain de l’innovation. Ce qui n’est évidemment pas une bonne nouvelle pour les entreprises médias ayant déserté ce terrain pendant de longues années…

Cédric Motte - Attention, suis en mode troll ce matin ;-). En suivant votre logique de raisonnement sur facebook, par exemple, vous n’avez donc rien contre le fait que les photos de vos enfants ou de votre femme/copine soient réutilisées pour des pubs ?

@Christophe Lefevre À la différence que ta réponse en interview dans un journal, c’est de “l’opt in”. Tu choisis de répondre, ou pas, à un journaliste.

@Francois Lamotte Google a bâti son business sur sa capacité à crawler les pages web et à les rendre accessibles. Il a utilisé le principe même du web pour ça, il fournit un service de qualité, il en a tout à fait le droit. Mais il a profité de nouvelles capacités techniques qui passent au dessus de la notion de propriété (et c’est le vol comme disait Proudhon :-)). Je sais, “c’est comme ça”. Mais si, techniquement, je construis une clé qui me permets de rentrer chez vous pour piquer vos ordinateurs, les revendre, tout en créditant l’acte de vente “Ordinateur trouvé au 32 de la rue de Flandres”, comment réagiriez-vous ? Est-ce à vous de mettre un autre verrou ? Pour finir, un billet rédigé sur mon blog en 2006, afin de vous montrer que je ne suis pas totalement étranger à la problématique !

Francois Lamotte – @Cedric Motte pour les photos sur Facebook, il y a différentes options pour limiter l’usage du contenu. A-t-on déjà vu des images “privées” ré-utilisées par Facebook pour en faire des publicités ? L’analogie avec la clé pour rentrer chez les gens est plutôt mal trouvée (mode troll)… Google passe là où les portes sont grandes ouvertes. A priori si tu laisses les portes et les fenêtres grandes ouvertes de ta maison, de tes bureaux, de ton musée, de ta bibliothèque municipale et personne à l’entrée pour contrôler qui entre et qui sort : personne ne sera étonné à ce qu’on vienne te “voler” tes objets. Dans notre société, il y a des techniques et des conventions utilisées pour les espaces qu’on souhaite protéger : des portes, des serrures, des volets métalliques… Des éditeurs qui laissent les portes grandes ouvertes (en feignant de croire qu’il n’y aucun moyen de se protéger) et en reprochant aux “voleurs” de venir se servir, c’est un peu grotesque, mesquin et malhonnête.

Vision limitée du droit d’auteur

Alexandre Dulaunoy - En 2006, Alain Berenboom estimait des “pseudo” pertes pour les quotidiens francophones, et Copiepresse (la SCCRL) suivait l’avis des juristes pour une procédure légale. Le monde Internet savait que c’était une grosse bêtise juridique mais Copiepresse et la JFB (SCRL Les Journaux Francophones Belges) croyaient ses juristes ayant une vision limitée du droit d’auteur (dans ce cas, on devrait plutôt parler du droit d’éditeur…). Nous sommes en 2011, tout le monde est perdant dans ce cas sauf les juristes “pro” droit d’éditeur qui essayent de pousser pour une judiciarisation de la société de l’information. La solution n’est pas juridique…

Jacopo GIOLA – Qui sont les avocats de CopiePresse ?

Alexandre Dulaunoy - Alain Berenboom était un des experts commandés pour l’évaluation des pertes. Mais l’avocat de Copiepresse est Bernard Magrez. On peut même lire dans sa bio :

Il a reçu, à Londres, le “Global MIP Award 2008 (Best Europe case)” de la revue “Managing Intellectual Property” pour le procès mené par COPIEPRESSE contre GOOGLE Inc.

Tout le monde perd sauf les juristes…

Christophe Lefevre - Un des problèmes, c’est que la plainte date de 2006 et que la situation a changé aujourd’hui. Je veux bien croire qu’en 2006, Google News était considèré comme un probable concurrent. Aujourd’hui, c’est un module du moteur de recherche. Il aurait été plus intelligent de réanalyser la situation, mais ça aurait été trop difficile pour CopiePresse d’avouer qu’ils se sont tromper. Pour moi, c’est une histoire de sous, d’ignorance ET de fièreté mal placée !

Jacopo GIOLA – D’accord avec tous, mais le fond reste… Il n’y a pas partage des revenus (même symbolique) de la part de Google pour des contenus qu’il n’a pas produit. Par exemple Google Maps ne “pompe” pas les adresses des rues mais les achète à TeleAtlas… C’est en ce sens que Google aurait pu faire un geste… aurait ;-)

Francois Lamotte – @Jacopo GIOLA Franchement je ne te suis pas là dessus pour le “geste à faire” et alors pour le trafic “gratuit” que Google envoie (30 à 40% du trafic des journaux) ces derniers pourraient faire aussi un geste pour Google. 30% de ton chiffre d’affaire qui vient d’un partenaire cela peut avoir une importance qu’on sait mesurer facilement. Sans tenir compte du fait que le flux des ces médias est du copié/collé d’agences de presse à 95%. Ce contenu est déjà amorti en amont dans sa logique de création.

Cédric Motte – @Christophe Lefevre fierté mal placée, peut être, mais il n’empêche que cela soulève de vraies questions. La réponse de Google est claire, en tout cas : votre contenu ne vous appartient pas.

@Francois Lamotte tu es un peu dur avec les sites des journaux. La proportion de dépêches à tendance à se réduire – ou est sur le point de l’être. Mais surtout, je ne suis pas ton raisonnement. Les sites des journaux existaient avant Google – ie celui du Soir dont la première capture par archive.org remonte à décembre 1996, quand Google est né en 1998. Google a basé son business sur une commodité, celle de faciliter l’accession aux pages web non éditées par lui. Ce n’est pas Google qui a apporté de la valeur au web en premier, c’est le web qui a apporté de la valeur à Google.

Jacopo GIOLA - exact Cedric, et au début Google ne proposait que le lien direct sans résumé ! Juste pour garder les proportions :

Astreintes journalière menacées : 25.000 €
Reserves en cash ou équivalent de GGL: 36 BLN $

Francois Lamotte – @Cédric Motte “C’est le web qui a apporté de la valeur à Google”… Je m’excuse mais c’est l’inverse. Si Google détient une position dominante au niveau de la recherche, c’est bien qu’il a innové sur la façon de classer l’information. Et sa valeur ajoutée est là. On peut contester les logiques de classement (mais c’est une autre discussion). Si ce n’était pas le cas, nous aurions 3 à 5 services de recherches qui se partageraient ce marché là. Et pourtant les montants colossaux investis par Bing et les startups du secteurs ont du mal à progresser. Tu peux avoir autant de sites plus anciens que Google, cela ne change rien : si tu reposes sur un modèle publicitaire et que tu n’as pas de trafic, tu n’existes pas ou moins facilement. Et Google te propose deux services de bases : un service de trafic payant par ses régies publicitaires, et un service gratuit par ses classements de résultats (sous différentes formes).

J’aimerais bien comprendre pourquoi les journaux veulent bien être présents sur les résultats de recherches et pas dans les news alors que la mécanique de classements, d’extraits etc est la même (et si les fonctionnalités sont adaptées sur le thème de l’actualité pour Google News). Google exploite aussi ses résultats pour sa régie publicitaire. Sauf si je me trompe, Google ne récupère pas les contenus pour le transformer : par exemple faire un seul article sur une actualité en extrayant des contenus séparés (illustration, photo, vidéos…) mit en page autour d’un résumé textuel ? A l’instar de DJ ou de sampleurs, il extrait le titre et quelques 160 caractères pour présenter un article. On reste dans l’ordre de la citation. Je ne suis pas un défenseur de Google à tout prix, je trouve juste que dans cette histoire CopiePresse se met le doigt dans l’oeil au mépris des avantages qu’il en tire déjà et de pratiques d’un écosystème comme Benoît Marchal l’expliquait très bien.

Jacopo GIOLA – @Francois Lamotte Le problème avec les news c’est que si Google publie ça:

PM’s Murdoch press links defended
BBC News – ‎8 minutes ago‎
Foreign Secretary William Hague has defended David Cameron, saying he was “not embarrassed” by the extent of the PM’s dealings with News International.

Moi, je n’ai plus besoin d’aller à la source. Mais si je publie ça :

PM’s Murdoch press links defended
BBC News – ‎8 minutes ago‎

Je suis “obligé” d’y aller… Alors, que chaque titre définisse, lui, ce qu’il veut donner à Google pour que Google crée son agrégateur.

Les choix de l’éditeur

Benoît Marchal – @Jacopo GIOLA le problème n’a jamais été la quantité d’information partagée, indexée ou affichée dans le résultat de la recherche. Avant le procès, après le procès, chaque site web (y compris donc ceux de la presse belge) a toujours été libre de définir très précisément ce qu’il permettait d’afficher dans l’index. De même que Google a toujours été libre de choisir ce qu’il indexait dans ce qu’on lui proposait. Il est essentiel de comprendre que ça n’a jamais été ça l’objet du procès. Google ne décide pas s’il affiche un résumé ou s’il envoie à la source. C’est l’éditeur qui avait et a toujours tout pouvoir là-dessus et le jugement n’a rien changé à ça.

Mais comme Internet, ne se résume pas aux seuls titres de presse belge, la solution pour établir ce que Google (et les autres moteurs) affichent fait l’objet d’un protocole… Protocole c’est le terme technique pour “règles de vie en commun.” La seule chose que Copypresse a demandé dans ce procès, c’est de pouvoir ne pas respecter les règles de vie en commun. Donc, en fait, ce qu’ils ont voulu obtenir c’est la création d’un Internet à deux vitesses. D’une part les sites de la presse belge et d’autre part le reste de l’Internet. Les deux obtiennent le même résultat mais la presse belge le demande autrement.

C’est très grave parce que c’est une atteinte à la neutralité d’Internet : si je suis assez riche pour me payer un procès, je peux demander mon protocole à moi. Si je ne suis pas assez riche pour ça, j’utilise le protocole commun. Non seulement c’est grave mais en plus c’est stupide. C’est stupide parce que déterminer ce qui s’affichait dans les résultats de recherche a toujours été sous le contrôle exclusif de l’éditeur (je me répète mais c’est important). Leur problème n’a donc jamais été devant la justice puisque le problème, le vrai problème c’est la monétisation. Le billet de Cédric Motte (voir son commentaire) est d’ailleurs instructif et contrairement au jugement, contrairement à l’opposition en cours, ce billet pose les vraies questions. Ce conflit juridique n’est qu’une distraction qui nous éloigne du vrai problème, qui nous éloigne donc d’une solution et qui, comme Christophe Lefevre le notait, ne sert qu’à enrichir les avocats.

Damien Van Achter – Très intéressant ce que tu dis Benoit, notamment à propos de la neutralité. Philippe Laloux disait exactement l’inverse !

Alexandre DulaunoyL’article du Soir ne fait plus référence à l’acte du tribunal et aux analyses de leur juriste faites en 2007. Dans l’acte de cessation, il est clairement indiqué “cache” et Google” dans l’acte rendu par le tribunal de première instance de Bruxelles N° 2006/9099/A :

Condamnons la défenderesse à retirer de tous ses sites (Google News et « cache » Google sous quelque dénomination que ce soit), tous les articles, photographies et représentations graphiques des éditeurs belges de presse quotidienne francophone et germanophone représentés.

Le cache est une partie intégrante de l’indexer puisque les pages sont indexées à partir de ce contenu. De plus, les avocats “pro Copiepresse” considéraient même que le droit de reproduction n’était pas autorisé pour faire l’indexation. Le Soir devrait râler sur ses avocats et sur Copiepresse et non sur Google… qui applique simplement les demandes de 2006-2007.

Jacopo GIOLA – @Benoit Marchal je retrouve dans les “papiers de Damien Van Achter :

Google ne s’est pas le moins du monde séparé de son cache. Ce sont les journaux qui ont juste accepté d’utiliser le tag “noarchive”… La différence est de taille, surtout quand Mme Boribon nous “vend” ça comme LE mérite de cet accord. Ca ne manque pas de piquant quand on reprend l’argumentaire de Copiepresse développé jusqu’ici et qui, en gros, disait “il n’est pas normal que nous devions nous protéger du vol de Google en taguant nos articles”.

C’est donc bien un problème de gestion des contenus et aussi, de monétisation car comment justifier une monétisation si on a pas “le contrôle de ses contenus” ?

Benoît Marchal – @Jacopo GIOLA : on est tout à fait d’accord. Cette accord démontrait par l’absurde que les éditeurs belges ont toujours eu le contrôle sur la gestion de leur contenu, qu’il n’y avait nul besoin de procès pour l’affirmer et qu’il n’y avait là nulle victoire pour la presse belge. Comme tu le rappelles, les termes de l’accord (survenu quand la presse a mesuré le coût de la désindexation qu’elle avait obtenue en justice) se résumait à ce que la presse belge utilise le protocole Internet accessible à tous depuis toujours (protocole accessible à tous donc neutre). Damien Van Achter avait à l’époque bien fait son travail de recherche.

Xavier Lambert - Le pire c’est que sans Google on va avoir un mal de chien s retrouver certaines de nos pages…

Christophe Lefevre – @Xavier Lambert C’est drôle, je me posais la question, les moteurs de recherches natifs aux sites sont souvent catastrophiques :-). La presse de façon générale est géniale : elle refuse de rétribuer Apple pour la vente d’abonnements sur sa plateforme iOS comme tout le monde, elle veut interdire la RTBF de faire du web, elle voudrait des règles d’indexations spécifiques ! Moi je pense que la presse devrait s’associer aux majors de la musique pour faire un procès à Dieu qui n’a pas fait le monde exactement comme ça les arrange ! Oui, les temps changent, c’est pas de bol !

Ce qui m’ennuie, c’est que la presse qui s’est mise dans cette situation risque de revenir en arrière, peut-être pas tous les journaux, mais certains ont trop besoin de Google. Je les vois mal faire un procès à Google pour désindexation abusive (quoique) mais plutôt faire un accord à l’amiable, ce qui pourrait que renforcer le géant américain et décrédibiliser la presse belge. Le gagnant dans cette histoire, c’est Google, certainement.

Les producteurs de contenu oubliés

Mehmet Koksal - On parle toujours des intérêts de Google contre les éditeurs mais tout le monde semble ignorer le travail des producteurs de contenu (aka “journalistes”) qui sont les véritables spoliés dans cette affaire, non ?

François Schreuer - Spoliés par qui ? Par la bêtise de leurs employeurs ? Sans doute, oui…

Xavier Lambert - Google facilite l’accès aux contenus produits par les journalistes. La question de la monétisation et donc de la rétribution vient après il me semble. C’est d’ailleurs le délicat exercice des sites qui veulent passer à un accès payant, tout en continuant à être indexés.

Mehmet Koksal – @François Schreuer Que les choses soient bien claires : Google n’est ni plus ni moins qu’une vulgaire société cherchant d’abord à maximiser ses profits (comme toutes les autres Facebook, Twitter et consorts), il convient de la traiter comme telle et non comme une organisation humanitaire œuvrant sur base des principes démocratiques régissant une communauté (Internet). Google ne doit pas nécessairement changer d’algorithme ou de modèle, il peut faire quelque chose de plus simple : payer ou créer une plateforme soutenant financièrement le travail des producteurs de contenu qui alimentent son modèle économique. C’était à mon avis le sens de la démarche judiciaire de Copiepresse et de la SAJ en assignant en justice ce géant américain. Maintenant il semble que ce soit le retour des flammes et la guerre des tranchées entre les deux camps. Je n’ai non plus aucune sympathie pour ces patrons de presse belge qui font signer des contrats de travail où le travailleur cède gratuitement tous ses droits d’auteur et de reproduction à vie et sur tous les supports. Ils font en interne avec leur propre personnel ce qu’ils reprochent à Google de faire. C’est ça qui est quand même positif dans les mesures de rétorsion utilisées par Google à l’égard des titres et qui rappelle aux patrons ce vieil adage : ne faites pas aux autres ce que vous n’aimeriez pas qu’on vous fasse.

Damien Van Achter – @Mehmet Koksal “vulgaire société” ? c’est très péjoratif comme qualificatif. Sauf si “vulgaire” =”commun”. Mais tu as raison. Journalistiquement, il faut traiter les big company du web comme on traite les big pharma ou les big de l’agro-alimentaire. Et je te rejoins tout à fait aussi sur la détestable habitude qu’ont les patrons de presse (et médias en général, sans distinction) à considérer leurs forces vives comme du bétail, payé au lance-pierre avec des contrats ultra-précaires. On ne peut produire de la qualité (et revendiquer d’être traité comme tel) si l’on procède en interne comme à l’abattoir et au canon à dépêches. Le conflit auquel nous assistons est vraiment à la croisée de tous les chemins et montre bien les limites de chacune des parties. Et +1 sur ta conclusion (qui est pile-poil pour un dimanche :-))

fabrice massin - Pour ce qui me concerne, il me semble que cette attitude de conflit des éditeurs envers tous les concurrents ou supposés l’être n’est pas saine, le web belge a tout intérêt à s’auto-stimuler positivement en développant des nouveaux contenus et services en tentant de faire preuve d’innovation avec pour seules finalités de servir la communauté de tous les internautes. Sommes-nous si forts qu’il soit nécessaire de perdre son temps, son argent et ses ressources pour devoir se défendre/s’attaquer les uns contre les autres ? Et bientot on va aussi attaquer Facebook et puis Twitter etc. ? Tous ces puissants acteurs du web doivent bien évidemment faire des profits c’est vrai, mais ils contribuent aussi au développement d’autres activités web et aussi à relier entres elles des millions de personnes dans notre pays.

Comme certains l’ont fait justement remarquer, aucun média n’est correctement référencé dans Google à moins d’avoir fait les développements techniques nécéssaires et ce, pour tous les services de Google. Alors pourquoi cracher dans la soupe ? Ok, l’argent est une bonne raison pour certains. Rien de repréhensible mais quand on envoie des missiles il ne faut pas s’étonner de ramasser une bombe en retour ! Quels sites de médias peuvent se permettre de vouloir se passer de ces acteurs quand on sait que dans les 5 ans, plus de 50 à 75% du trafic passera par ces acteurs ? Evidemment certains pensent qu’ils sont indispensables et que tous les moyens sont légitimes pour obtenir de l’argent et donc pour entraver ceux qui ne pensent pas comme eux… So be it, nous ne sommes plus au siècle des Lumières, mais je pensais à la citation de JJRousseau “l’homme nait naturellement bon, c’est la société qui le corrompt…. je paraphaserais :

Le web est né naturellement bon, ce sont certains acteurs qui tentent de le corrompre et de le foutre en l’air

Et ça, c’est pas démocratique.


Article initialement publié sur Blogging The News
Crédits photo FlickR CC : by-nc-sa ekaï / by-nc-nd keso / by-sa manfrys / by Giles Douglas / by Michperu

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http://owni.fr/2011/07/18/copiepresse-vs-google-de-l%e2%80%99index-au-majeur/feed/ 5
Coming out by Google http://owni.fr/2011/06/10/coming-out-by-google-gay/ http://owni.fr/2011/06/10/coming-out-by-google-gay/#comments Fri, 10 Jun 2011 09:02:39 +0000 Didier Lestrade http://owni.fr/?p=67257 Donc Le Monde a publié le 15 février dernier un article sur les Français qui semblent être obsédés à l’idée de savoir quelles sont les personnalités juives du pays. Il suffit d’aller sur Google et de taper le nom de telle ou telle personnalité, politique ou pas, et de voir quel est le premier référencement qui apparaît à côté de ce nom. Un autre article du Nouvel Obs signalait que les Français ont l’air de s’intéresser à d’autres questions curieuses assez proches.

Et maintenant, un autre scandale éclate en France sur un ancien ministre qui aurait participé à des sauteries avec de jeunes garçons au Maroc. Comme la vie privée est particulièrement bien gardée dans ce pays, que les médias ne sont pas vraiment connus pour leur curiosité, et que le Off the record est comme une double personnalité, on dirait que la soif de curiosité commune à tous, c’est l’homosexualité. Vous voyez quelqu’un qui vous intrigue à la télé ou dans la presse, c’est parfois une grosse folle qui n’a pas fait son coming-out et vous réalisez que pas un journaliste n’a eu le courage de lui demander quoi que ce soit. Moi homosexuel ? Mais enfin, cela ne vous regarde pas!

Mais Google est là et merci quoi. Google révèle ce que vous voulez savoir. Pour chaque personne qui demande au devin Google de lui dire si Lambert Wilson est gay ou pas, le moteur de recherche comptabilise la demande. Et plus les demandes sont nombreuses et plus les réponses montent en première page. Cela ne veut pas dire qu’on a la réponse à la question. Cela veut dire que vous n’êtes pas le seul à vous la poser, loin de là. On arrive au stade évident où Google est l’agrégateur favori du coming-out. Il suffit de taper le nom de quelqu’un pour vérifier la puissance statistique de la « rumeur » et si on peut se faire une idée.

Ce qui est fascinant, c’est que pas un seul groupe gay n’a vraiment utilisé cet outil. Il y a des dizaines et des dizaines de gays et de lesbiennes qui ne font pas leur coming-out et qui, pire encore, remplissent des fonctions où leur inaction en faveur des gays et des lesbiennes les met dans une position de lâcheté politique. Pire encore, certains utilisent le secret qui entoure leur identité pour imposer encore plus le tabou autour d’eux, dans leur entreprise, dans leur parti politique. Ils travaillent dans l’éducation, mais se désintéressent de l’homophobie à l’école, au lycée, à la fac. Ils sont chefs d’entreprise, mais cautionnent le bullying et la discrimination. Ils sont journalistes, mais évitent soigneusement toutes les news liées à l’actualité LGBT. Ils font partie de l’élite, mais menacent d’action juridique quand on leur dit qu’on est au courant de toutes leurs pratiques sexuelles – dont certaines ne sont pas safe.

Folles ≠ Geeks ?

Ces associations LGBT soit-disant « radicales » n’ont jamais pensé à utiliser Google comme base d’un argument politique. OK les Panthères Roses ont peut-être du mal avec Safari ou Firefox. OK, Act Up, ou ce qu’il en reste, doit avoir tous ses ordis en panne. Et les célébrités en question n’ont toujours pas compris comment on fait, techniquement, pour disparaître de certaines questions posées par les moteurs de recherche. Ou alors, pensent-ils, c’est une manière de faire leur coming-out sans le faire. Imaginons qu’ils se disent “Bah, je ne l’ai jamais caché, il suffit de taper mon nom sur Google et vous avez la réponse !”. Cela devient le coming-out non officiel, l’affirmation en demi-teinte, le Who’s Who underground, l’identité gay du pauvre, le Facebook des non-amis, l’antichambre de la vérité. Le problème, c’est que nous, les gays, on a développé le gaydar, cette intuition qui nous permet de reconnaître (presque à 90%) qui est gay ou pas. Le reste des mortels a besoin de Google. Parfois, c’est le gaydar des hétéros.

Arrêtez de pleurer. C’est ce qui se passe quand on devient une personnalité publique. Les gens disent n’importe quoi sur vous. Ils croient que vous leur appartenez. Et ça ne part pas d’un mauvais sentiment, ils sont souvent fans vous savez. Bien que je me sois toujours demandé comment on pouvait être fan de Marc-Olivier Fogiel. Mais comme le militantisme gay d’aujourd’hui est au point mort dans ce pays, puisque le coming-out a été mis à la trappe du calendrier homosexuel, puisque le PS a vraiment d’autres chats à fouetter que de pousser un ou deux députés à faire leur coming-out (pas un seul député gay à l’Assemblée Nationale, bravo), puisqu’on persiste à vouloir se moquer de nous en disant que la sexualité n’est pas un sujet d’intérêt dans la République laïque, que c’est même grossier de poser des questions intimes vous devriez avoir honte, alors il ne faut pas s’étonner quand les gens prennent le contrôle de leurs doigts sur le clavier de l’ordi et cherchent les noms des personnes les plus lâches de l’élite. S’ils sont pathologiques sur leur identité, nous ne le sommes pas.

Bah, vous avez bien compris, je ne suis pas en train de faire de l’outing, hein ? Si Le Monde a le droit de publier un article sur papier, diffusé, vendu sur la judéité de personnalités publiques qui n’ont peut-être pas envie d’aborder ce sujet en public (bien que je ne vois pas où est le problemo), mais qui suscite la curiosité de centaines de milliers de personnes, c’est pareil avec les gays et les lesbiennes célèbres. Si vous regardez sur Internet, vous finirez par découvrir qui passe son temps au Crillon avec des tapins qui coûtent très cher car il y a toujours un groom qui a vu le petit manège.

Si vous avez un présentateur télé qui va au Dépôt et qu’il se fait sucer par 3 mecs, faut pas s’étonner si ces trois homosexuels vont raconter les détails. Vous croyez qu’on vit dans un monde qui n’est pas influencé par la pipolisation encouragée à longueur de journée par ces personnalités elles-mêmes ? Ce n’est pas moi qui parle de faits divers et de célébrités, moi je ne suis intéressé que par le sida, les minorités et la culture homosexuelle. Je ne sais même pas qui sont ces gens qui sont jurys de X Factor ! Vous pouvez me chercher sur Google, je ne suis pas dans le carré VIP moi. Je suis juste un journaliste sans travail qui passe sa journée devant l’ordi à taper les noms des célébrités politiques et je suis étonné de voir le mot gay attaché à leur nom. Faites un procès à Google, pas à moi.

Le pouvoir de la rumeur

Mais tout ceci tombe à pic alors qu’un autre scandale sexuel éclate en France et que les éditorialistes s’insurgent encore contre le pouvoir de la “rumeur”. Après DSK qui a fait effet de catalyseur, selon Valérie Touranian [EN] de Elle, et instaure un « avant et un après » (on attend les preuves tangibles de l’après), après Tron qui démissionne, Arrêts Sur Images persiste à enquêter sur les scandales  sexuels politiques. Car toute la classe politique a déjà oublié son mea culpa post –DSK et ses promesses de cohérence. La vie privée doit être protégée ! Caroline Fourest défend DSK en disant qu’il ne faut pas fouiller dans les poubelles, Roméro appelle au coming out des parlementaires après avoir été lui-même outé, Patrick Bloche ne sait pas pourquoi il n’y a pas un seul député gay en France.

Pas étonnant qu’on n’avance pas sur le mariage gay quand les leaders LGBT ont une vision politique si étriquée. 40 années de militantisme gay, et une lesbienne défend un homme accusé de tentative de viol. Un gay qui a été planqué une grande partie de sa vie (c’était pour sa mère vous comprenez) fait la leçon aux autres. Et ce Bloche, qui est dans le milieu politique depuis le XIXème siècle (non c’est pas une erreur de typo) n’a TOUJOURS pas une idée de la source de lâcheté politique de ses semblables à l’Assemblée Nationale. Super, pas besoin de s’offusquer des déclarations de la députée UMP Brigitte Barèges si vous sortez des énormités encore pires, vu votre background.

Alors, on remercie Google d’être le meilleur ami de l’outing. Tapez le nom de l’homme ou de la femme politique qui vous intrigue le plus parce que votre gaydar vous dirige dans la bonne direction et voyez ce que ça donne. Le mot gay apparaît en premier ? Bingo. Attendez, parfois il y a le nom de son partenaire dans la vie tout de suite en dessous de “gay” ! Mais ne vous arrêtez pas en si bon chemin. Dans la première page, ou la seconde, vous aurez peut-être la chance de découvrir le témoignage d’une personne naïve et de bonne foi qui, sans malice, a écrit dans son blog : “Wow, je ne savais pas que XX était gay ! Je l’ai rencontré dans un club gay du sud de la France, on a discuté et il m’a dit lui-même qu’il était gay !“. Ou mieux, vous aurez le témoignage du tapin qu’il s’est fait en 2009 ou 2010.

Et surtout, surtout : ce n’est pas parce qu’ils sont mariés et qu’ils ont deux enfants qu’ils ne sont pas gays, vous comprenez. Il y a même des présidents de grandes fédérations de sport qui sont concernés. Merci Google. Comme le rappelait Albert R. Hunt dans un édito [EN] du New York Times que l’on aurait bien aimé lire dans Têtu : “Ce que les électeurs ne pardonnent jamais, c’est l’hypocrisie“.  Avec un peu de volonté, ceci pourrait être le nouvel âge d’or du militantisme LGBT. Il n’y a qu’à se baisser… et tendre la main pour trouver les infos.

Article initialement publié sur “Minorités” sous le titre “Google, le meilleur ami de l’outing“.

Photos Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par CarmanAvenue et PaternitéPas d'utilisation commerciale Eric Constantineau

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http://owni.fr/2011/06/10/coming-out-by-google-gay/feed/ 4
Référencement, viralité: l’ère des bulles d’internautes http://owni.fr/2011/05/07/referencement-personnalise-social-search/ http://owni.fr/2011/05/07/referencement-personnalise-social-search/#comments Sat, 07 May 2011 14:20:05 +0000 Boumbox http://owni.fr/?p=61509 La plupart des gens ne le savent pas, et ce ne sont certainement pas les consultants en référencement qui vont le leur dire, mais on ne peut pratiquement plus être « le premier résultat sur Google ». C’est fini depuis 2009. « Le référencement est un mensonge ».

Fin 2009, Google a en effet généralisé la personnalisation des résultats : désormais, même si vous n’avez pas de compte Google, que vous n’êtes pas logué (( identifié à votre compte )) , du moment que vous ne faites pas des trucs de parano geek total (ou d’internaute moyen d’il y a cinq ans), comme effacer vos cookies et aller regarder dans les options de Google, vos résultats de recherches seront customisés en fonction de toutes ces choses que Google sait sur vous.

En clair, ça veut dire que quand vous vous étonnez de voir votre site, ou le site de votre pote si bien classé par Google, ça n’est pas forcément le cas pour le reste du monde, et quand quelqu’un vous montre le truc bizarre que Google lui a suggéré en disant « les gens sont bizarres »… c’est sûrement lui qui a quelques trucs bizarres dans son historique web.

Plus embêtant, ça veut aussi dire que si vous êtes du genre voyageur, quand vous allez taper « Égypte » les premiers résultats qui apparaîtront seront probablement des offres de Promovacances ou Last Minute, alors qu’un autre utilisateur obtiendra peut-être la page Wikipedia. Ou bien les derniers résultats Google News. Ou Google Images. Moi quand je tape « Égypte » dans Google, j’ai droit à des gifs porno. Mais c’est juste moi, ça m’arrive tout le temps, ne vous inquiétez pas.

On appelle ça la Filter Bubble : plus le web est personnalisé, plus vous vous retrouvez enfermé, prisonnier de vos propres tendances. Vous ne voyez plus le monde qu’avec des œillères et vous le remarquez d’autant moins qu’elles ont été faites pour vous cacher ce que vous ne voulez pas voir. Même les réseaux sociaux vous renferment : si vous n’interagissez pas beaucoup avec un « ami » sur Facebook, s’il propose du contenu qui ne vous « engage » pas suffisamment, Facebook le fait disparaître de votre newsfeed.

Il y a une différence fondamentale entre les vieux algorithmes de recommandation encore utilisés par la plupart des sites d’e-commerce qui vous disaient simplement “les gens qui ont acheté X ont aussi acheté Y” et les algorithmes d’aujourd’hui qui prennent en compte des dizaines de paramètres personnels pour chaque utilisateur et qui, à la manière de Google Instant, peuvent trouver pour vous ce que vous cherchez avant que vous ayez fini de le taper. « Dans dix ans, on rira du temps où l’on devait taper une recherche dans Google pour trouver ce qu’on voulait », disent les vendeurs de personnalisation. Et dans vingt ans on rira peut être de l’époque où l’on réfléchissait par nous-même avant de rechercher ce que l’on voulait ?

Des titres de tabloïd ?

Les sites de contenu commencent tout juste à se détourner d’une logique de référencement, cette époque où leur capacité à « remonter sur Google » dictait la forme de leur produit. En gros, pour moi, en tant que journaliste, ça voulait dire que je devais donner des titres pas très rigolos à mes articles, où les mots clés devaient absolument apparaître clairement, et qu’il fallait que je les replace encore dans le début de l’article, dans les intertitres, etc… Au risque de se retrouver avec des articles didactiques et sans style : on écrivait comme des robots parce qu’on écrivait pour des robots, les crawlers de Google.

Aujourd’hui, donc, ces mêmes sites passent à une logique de partage : ils cherchent à produire du contenu qui va « devenir viral » sur les médias sociaux. Ça veut dire qu’il faut des titres chocs, peu importe le contenu de l’article, beaucoup vont partager sans le lire. Ça veut aussi dire qu’il faut produire du contenu sur des sujets qui intéressent vraiment les gens : “la petite culotte de Kate Middleton” , “Carla Bruni est-elle enceinte ?”. Il faut devenir démagogue, il faut devenir un tabloïd. C’est le modèle du Huffington Post.

tabloid

Mais l’avenir n’est pas à la démagogie, pas de ce genre là en tout cas. L’avenir est à la personnalisation, et donc aux micro-niches. Faire appel au plus petit dénominateur commun, c’est quand même manquer une grosse partie de la population. Plus la partie du web perçue se réduira à mesure que nos œillères deviendront de plus en plus perfectionnées, plus la viralité deviendra un objectif difficile à atteindre.

La personnalisation du web, le « behavioural targeting » ou quel que soit le nom que vous donniez à ce phénomène, c’est en train de donner une deuxième jeunesse à la longue traîne, et c’est le prochain cauchemar des sites de contenu. Et de la démocratie, aussi, mais on s’en fout, ça fait longtemps qu’on sait qu’elle ne rapportera plus une thune.


Article initialement publié sur Boumbox.

Photo Flickr CC PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales par Stéfan

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http://owni.fr/2011/05/07/referencement-personnalise-social-search/feed/ 28
Artistes: donner votre album a du bon http://owni.fr/2011/01/14/artistes-donner-votre-album-a-du-bon/ http://owni.fr/2011/01/14/artistes-donner-votre-album-a-du-bon/#comments Fri, 14 Jan 2011 14:42:33 +0000 Jim Grobecker http://owni.fr/?p=29566 Jim Grobecker développe des stratégies marketing pour des artistes et des marques. Il possède son propre site et publie également sur Music Think Tank.

C’est un fait : tout le monde télécharge de la musique gratuitement.

Sean Parker, connu pour être l’un des fondateurs de Napster a récemment affirmé dans une interview si l’on “regarde les chiffres, c’est entre 4 et 10 milliards de titres qui sont téléchargés illégalement chaque année, contre environ 4 milliards de téléchargements légaux”.

La musique sera toujours présente sur les plateformes de partage de fichiers et les internautes continueront à télécharger de la musique gratuitement, mais pour les artistes, enregistrer est encore plus important qu’avant. Les contenus enregistrés ont une nouvelle raison d’être. En effet, ils ne seront plus une source de revenu directe pour les artistes, mais serviront aux consommateurs de point d’entrée dans la “marque”. Les revenus seront générés par les produits dérivés ou les places de concerts, ou encore par le biais de partenariats avec des marques cherchant à s’associer avec des artistes pour relayer leurs valeurs. La solution au problème du partage de fichiers passe par une meilleur gestion de leurs enregistrements de la part des artistes en créant par exemple sur leur site web une page d’entrée (ou landing page) dédiée à l’hébergement des fichiers en téléchargement.

Votre landing page vous veut du bien.

De nombreux facteurs définissent la manière dont les sites apparaissent dans les moteurs de recherche comme Google ou Bing. Jetons un œil aux facteurs de classement les plus importants qui asseyent l’autorité d’un site (classement basé sur le nombre de liens pointant vers votre site et sur la qualité de ceux ci), afin de souligner l’importance d’avoir une landing page contenant un lien de téléchargement gratuit :

- Les liens entrants : mènent vers votre site depuis d’autres blogs ou sites. Ces liens sont garants de l’utilité et la réelle valeur de votre contenu.  SEOmoz, leader dans le domaine du marketing en ligne et des algorithmes de classement, affirme que dans  24% des cas, le référencement provient de la notoriété globale du domaine, 22%  de la popularité du lien sur la page qui renvoie vers votre site, et 20% du texte utilisé dans ce lien. Les liens représentent donc 66% de la capacité d’un site à apparaître das les résultats d’une recherche.

Exemple : Wikipedia.org apparaît souvent très haut dans les résultats de recherche. Selon le site Yahoo Site Explorer, qui répertorie le nombre de liens d’un site, Wikipedia a plus de 8,2 millions de liens, qui plus est de sources très reconnues. C’est pourquoi Wikipedia apparaît dans les premiers résultats de recherche.

- Mots-clés : ce sont les termes que l’on utilise pour améliorer le référencement en les incluant dans le titre de la page d’entrée, l’url ou partout ailleurs sur la page. Les mots-clé correspondent à 15% environ des algorithmes de référencement. Gardez à l’esprit que même les mots-clés n’ont pas la même valeur que les liens, vous pouvez les contrôler plus facilement que les liens entrants.

Exemple : tapez “Rival Schools Torrent” dans Google et vous verrez que le premier résultat est un lien vers la landing page Piratebay.org. Elle contient les mots “Rival School” dans son titre ainsi que dans l’url ce qui a une incidence sur le référencement de cette page pour cette recherche en particulier.

Les réseaux de partage de fichiers contrôlent les liens de téléchargement gratuit.

Les internautes sont à la recherchent de musique gratuite sur la toile, ce qui bénéficie pour le moment aux sites de partage de fichiers. Il y a 6,2 millions de liens vers Piratebay.org, 6,4 millions pour Isohunt.com, 2 millions pour Utorrent.com et 3,8 millions pour Mininova.org. Ces liens sont attachés à des noms d’artistes et d’albums qui sont des mots clé que les internautes utilisent pour trouver de la musique en ligne. Pour cette raison, les sites de partages de fichiers sont souvent mieux classés dans les recherches que les sites des artistes eux-mêmes. Il suffit d’une fois pour convertir un fans au téléchargement illégal.

Comment capitaliser sur le partage de fichier contrôlé par les artistes ?

Lorsqu’un artiste crée une landing page dédiée contenant un album en téléchargement gratuit, les meilleurs sont souvent linkés. Plus les artistes seront linkés, plus ils supplanteront les sites de file sharing dans les moteurs de recherche et au final détourneront le trafic de ces sites. C’est le principe du file sharing contrôlé par les artistes, qui bénéficie directement aux artistes individuellement. Prenons un exemple :
Girl Talk, aka Gregg Gillis a sorti un nouvel album intitulé “All Day le 15 novembre dernier sur le label Illegal Art en tenant compte de ces concepts. Le disque était gratuit et hébergé sur une landing page, donnant ainsi 4 informations intéressantes:

1. Girl Talk s’est fait linker 14903 fois. Liens qui, sans landing page, auraient orienté vers les sites de file sharing. Le site de Girl Talk a été mentionné par des sites de référence comme Mashable.com et MTV.com, bénéficiant ainsi d’un meilleur référencement.

2. Hausse considérable du trafic le mois de la sortie. En regardant les statistiques grâce à Compete.com, on observe qu’entre mai et octobre, le site avait reçu 3025 visiteurs uniques. Pour le seul mois de novembre, on est passé à 211 111 VU.

3. Lorsque l’on tape “Girl Talk Download” dans Google, la landing page de GT arrive devant les sites de file sharing dans le résultats de recherche. Cela montre que le recours à ces sites devient inutile. C’est exactement comme ça que les artistes devraient utiliser le partage de fichier.

4. Les références à Girl Talk sur les réseaux sociaux ont explosé durant la semaine de sortie de l’album. La semaine du 15 au 22 novembre 2010, on compte 18,5 million de mentions sur Facebook et Twitter, contre 15 tweets la semaine précédente. Ces mentions on développé la “marque”  et encouragé les liens vers le site de l’artiste.

Optimisez votre landing page.

Il est clair qu’un album en téléchargement gratuit attirera les liens et les nouveaux visiteurs. Une landing page bien pensée transformera ces visiteurs en consommateurs. Faites en sorte que cette page soit une meilleure expérience pour l’internaute que les sites de partage de fichiers. Gardez à l’esprit que tout le monde n’attend pas la même chose d’un site web. Chaque visiteur est à un stade différent du processus d’achat. Certains connaissent déjà bien la musique et la “marque”, d’autres non. Considérez le processus d’achat comme un entonnoir. Le contenu enregistré est la partie haute de l’entonnoir, et constitue le point d’entrée dans le cycle d’achat et la marque de l’atiste. Une fois dans l’entonnoir vous devez guider le consommateur jusqu’en bas, jusqu’à la vente.

Les visiteurs qui viennent pour la première fois voudront découvrir l’album. Proposez un formulaire d’inscription à une newsletter, des liens vers vos profils sur les différents sociaux (ShareThis propose un tas de très bons plugins et de boutons personnalisables). Cela permettra à vos consommateurs de rester en contact avec vous et de revenir à la landing page lorsqu’ils seront prêts à passer à l’achat. Pour ces visiteurs “revenants” qui sont tombés amoureux de votre musique, il existe une immense opportunité de vendre du merch, des places de concert, et des coffrets exclusifs réservés aux super-fans. Tout cela doit se trouver sur la landing page. De la bonne musique vous permettra de vendre des produits dérivés.

Enfin, optimisez votre landing page en y plaçant des mots-clé spécifiques pour apparaître correctement dans les recherches. Faites une recherche avec “Google Keyword Tool” (assurez vous que vous avez coché l’option “exact match”). Lorsque vous ajoutez des mots clés sur votre site, mettez vous dans la tête d’un consommateur potentiel à la recherche de nouvelle musique. Essayez de voir à quel niveau de résultat arrive la recherche “votre nom torrent”. Le mot-clé “torrent” fait l’objet d’environ 151 millions de recherches chaque mois. C’est comme ça que les gens cherchent de la musique sur Internet.

Est ce que le fait de vendre 10€ un album qui de toutes façons se retrouvera sur les sites de file sharing a plus de poids que de l’offrir sur le site de l’artiste, générant ainsi un grand nombre de liens vers ce site ainsi que de meilleurs résultats de recherche, des ventes de merch, de places de concert et une présence en ligne plus efficace et durable ? Le partage de fichiers a déjà changé le paysage musical. C’est maintenant aux artistes de changer le paysage du file sharing.

Article initialement publié sur Music Think Tank

Traduction : Loïc Dumoulin-Richet

Crédits photos : FlickR CC Carlos-maya, niklaswikstrom, randradas

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http://owni.fr/2011/01/14/artistes-donner-votre-album-a-du-bon/feed/ 3
Quel type de compte Facebook faut il pour un musicien? http://owni.fr/2010/09/20/quel-type-de-compte-facebook-faut-il-pour-un-musicien/ http://owni.fr/2010/09/20/quel-type-de-compte-facebook-faut-il-pour-un-musicien/#comments Mon, 20 Sep 2010 07:15:15 +0000 Valentin Squirelo http://owni.fr/?p=26519 Même si la plupart des musiciens sont déjà présents sur Facebook, encore faut-il qu’ils aient choisi le bon type de compte entre le profil, le groupe ou la page. Passage en revue des subtilités du réseau social.

Facebook, le nouveau Myspace ?

On ne peut plus le nier aujourd’hui, avec ses 500 millions d’utilisateurs dans le monde, une moyenne de 55 min de connexion par jour et par utilisateur et un trafic supérieur à celui de Google, Facebook est devenu un site  incontournable. De la même façon que Myspace a été pendant de longues années (et peut être pour quelques temps encore) un outil essentiel pour sa présence web en tant que musicien, Facebook tend de plus en plus à avoir ce rôle.

Cependant, au delà d’une utilisation personnelle, le réseau social n°1 révèle de nombreuses subtilités dès lors que l’on désire s’en servir pour développer sa notoriété et sa communauté de “fans” et d’auditeurs.

Le principal écueil dans lequel bon nombre d’artistes tombent encore, est celui du type de compte Facebook dont ils se servent pour accroître leur visibilité.

Facebook eat you

Les différents types de comptes

Ils sont au nombre de 3, et chacun a vocation à être utilisé dans un cadre bien précis: le profil, le groupe et la page fan.

Le profil

Le profil a vocation à être votre compte personnel, celui où, en tant qu’individu, vous agrégez vos amis et vos connaissances croisées (la plupart du temps) dans la vraie vie. Sa limite principale, et rédhibitoire en tant qu’artiste, est celle du nombre d’amis, limité à cinq mille. De plus, vous devez accepter manuellement chacun de vos contacts.

Cependant, le profil peut aussi vous servir en tant qu’artiste. En rassemblant vos amis, des membres de votre famille, et des personnes connues dans votre vie off-network, vos contacts Facebook constituent une base influente que vous pourrez solliciter pour partager vos contenus.

Le groupe

Le groupe a lui pour but de rassembler des communautés autour d’un projet, d’une cause, ou d’un but commun, souvent avec une échéance à court terme. Les membres du groupe peuvent discuter entre eux, à la manière d’un forum. Cependant, son potentiel de communication est très inférieur à celui d’une fan page.

En effet, les publications du groupe Facebook n’apparaîtront pas sur le fil d’actualité des membres, seuls des messages pourront être envoyés par les administrateurs du groupe, communication intrusive qui risque vite d’être perçu comme du spam. Sans compter qu’une fois que votre groupe aura dépassé les cinq milles membres, cette fonctionnalité ne sera plus accessible, réduisant quasiment à zéro vos possibilités de communiquer.

Dernière limite, et pas des moindres : impossible de créer une URL personnalisée du genre http://facebook.com/votrenomdescene. L’adresse de votre groupe se résumera à une URL-type suivie d’une série de chiffre : http://www.facebook.com/group.php?gid=29658663743.

En plus d’être quasi impossible à retenir, cette URL où manque le nom de l’artiste empêchera un référencement naturel efficace dans les moteurs de recherche..

Pourquoi vous devez créer une page Facebook

C’est la page qui constitue le compte le plus adapté pour un artiste. Elle a été conçue par Facebook afin de permettre aux marques et aux artistes de faire leur promotion. Tout d’abord, vous pourrez lui attribuer un username, mais surtout diffuser vos publications sur les fils d’actualité des gens qui vous “aime”, comme y apparaît l’actualité de vos amis.

Vous allez également avoir accès à des statistiques très complètes: âge, sexe, localisation géographique, langue de vos fans, mais aussi évolution de la fréquentation et de l’activité de votre page.

La fan page offre par ailleurs des applications : un onglet player pour écouter directement vos morceaux, des modules pour synchroniser vos comptes Twitter et Facebook afin de les mettre à jour en même temps …

Enfin, aucune limite n’est imposé en termes de nombre de “fans” (personnes qui vous “aime” ou vous “recommande”).

Comment créer votre page Facebook

La première étape va être de se rendre à cette URL http://www.facebook.com/pages/create.php

Pour créer votre page, sélectionnez la catégorie “Artiste, groupe ou personnalité” puis dans le menu déroulant “Musicien”.

Entrez le nom de page souhaité (vous pourrez le modifier par la suite) et cochez la case “Je représente officiellement cette personne, entreprise, groupe ou produit et suis habilité(e) à créer cette Page”.

Vous n’avez plus qu’à cliquer sur le bouton “Créer une page officielle”.

Et voici le résultat une fois votre page crée

Ça y est, votre page Facebook est créée ! Vous allez pouvoir mettre en place les éléments de bases, tels que votre photo, vos informations, publier votre premier statut, etc. Et surtout la diffuser à vos amis et à vos fans.

Dernière étape développée dans cet article, l’attribution de votre username, c’est à dire de votre URL Facebook personnalisée de type http://facebook.com/votrenomdescene.

Il vous faut pour cela atteindre le nombre minimum de 25 fans, puis vous rendre sur http://www.facebook.com/username/, où vous pourrez tester la disponibilité de votre URL, et l’attribuer à votre page Facebook.

ATTENTION : vous attribuez définitivement ce username à votre page, vous ne pourrez plus JAMAIS en changer, ni le lier à une autre page.

Vous avez désormais votre page Facebook, correctement configurée avec votre username. C’est maintenant que les choses sérieuses commencent: diffuser du contenu régulièrement et construire votre communauté sur le réseau social !

Vous allez également pouvoir allez plus loin dans la personnalisation de votre page, notamment en y intégrant du son et des applications. Des sujets que nous ne manquerons pas de traiter dans les semaines qui viennent sur OWNImusic.

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Crédits photos Flickr CC : smlions12, poolski, Merrick Brown

Capture d’écran Facebook.com

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http://owni.fr/2010/09/20/quel-type-de-compte-facebook-faut-il-pour-un-musicien/feed/ 0
De qui ‘trou du cul’ est-il le nom? Eloge d’un bombardement sémantique http://owni.fr/2010/09/15/de-qui-trou-du-cul-est-il-le-nom-eloge-dun-bombardement-semantique/ http://owni.fr/2010/09/15/de-qui-trou-du-cul-est-il-le-nom-eloge-dun-bombardement-semantique/#comments Wed, 15 Sep 2010 06:30:24 +0000 Olivier Ertzscheid http://owni.fr/?p=28136

Prologue. Mettons les différents cas de figure suivants :

Si tu insultes le chef de l’État, tu risques :

Et si tu insultes le chef de l’État sur le web ? C’est plus compliqué.

Si tu insultes le chef de l’État sur un site Internet, si par exemple tu écris (ce qui suit n’est qu’un exemple, une illustration, et donc pas une insulte, hein ?), si par exemple tu écris, disais-je : “Nicolas Sarkozy est un trou du cul“, a priori tu encours également des poursuites pénales pour insulte (ou outrage, j’en sais rien, je suis pas Maître Eolas), vu que la loi s’applique aussi sur le web. Mais …

Mais si tu écris que : “la page classée première pour la requête ‘trou du cul’ sur Google est le compte Facebook officiel du président de la République“, ou – autre exemple – si tu écris, “il s’agit cette fois de désigner Nicolas Sarkozy comme un trou du cul“, ou bien encore, “grâce à cela, Nicolas Sarkozy est un trou du cul“, tu n’insultes pas le chef de l’État, tu relates ou participes à une forme de catharsis collective visant à détourner volontairement le fonctionnement des algorithmes de pertinence que les moteurs de recherche utilisent pour classer leurs résultats, tu fais du Google Bombing.

Plus subtil :

  • Nicolas Sarkozy est un trou du cul !” : c’est clairement une insulte.
  • Nicolas Sarkozy est un trou du cul !” : c’est toujours une insulte, mais doublée d’un Google Bombing.
  • Quel trou du cul !” : magie du lien hypertexte qui permet au signifiant de ne désigner qu’en creux son signifié et de garder celui-ci dans les limbes d’un intertexte en perpétuel réagencement jusqu’à l’activation délibérée dudit lien, magie du lien disais-je, ce n’est plus une insulte, c’est juste un Google Bombing :-)

Kesako Google Bombing ?

Le Google Bombing, comme l’écrit Wikipédia, est “une technique de référencement visant à influencer le classement d’une page dans les résultats du moteur de recherche Google. Elle exploite une caractéristique de l’algorithme PageRank qui accorde un certain poids au texte avec un hyperlien vers une page. Si plusieurs sites utilisent le même texte pour pointer sur la même cible, Google additionne ce poids et il devient possible de faire apparaître la page cible dans les résultats d’une recherche sur le texte contenu dans les liens pointant vers elle.” La suite de la page Wikipédia regorge d’exemples en tous genres. Je vous y renvoie.

Dernière bombe en date donc, celle renvoyant, sur la requête “trou du cul” à la page Facebook officielle de Nicolas Sarkozy. N’en fallait pas davantage aux médias internationaux de tous poils (sic) pour se faire l’écho de cet outrage par la bande. Joint au téléphone dans l’après-midi par une journaliste de l’AFP qui était tombée sur cet ancien article d’Affordance, notre conversation s’est transformée en dépêche AFP, laquelle s’achève sur un contresens dommageable que je vais ci-après m’efforcer de corriger (sans acrimonie aucune pour la journaliste en question : nous étions tous deux pressés par le temps, et l’entretien s’est fait dans l’urgence de l’événement, du coup je n’ai certainement pas été assez clair… et comme j’ai un blog pour rectifier le tir, j’en profite :-)

Retour sur la dépêche AFP.

Première inexactitude.

  • Q : En quoi consiste le “Google Bombing”, est-ce une nouvelle forme de piratage ?
  • R : “Ce n’est absolument pas du piratage mais simplement une manière d’utiliser et de détourner le système d’exploitation du moteur de recherche. Quand on veut “dézinguer” une page, l’objectif pour les auteurs est de produire un maximum de liens entrants dans Google qui associent un mot-clé et une adresse. Google évalue la valeur et la popularité des sites grâce à son système “PageRank”: donc plus ces sites ou ces pages ont un “ranking élevé” et plus ils auront de poids et d’influence pour que leurs informations figurent en tête des résultats de recherche”

Il ne s’agit pas du “système d’exploitation” du moteur de recherche mais bien de son algorithme, c’est-à-dire du programme informatique lui permettant de classer les pages par ordre de pertinence.

Deuxième inexactitude.

  • Q : Combien de sites ou de personnes interviennent dans un cas de ce type ?
  • R : “C’est très difficilement chiffrable, mais grosso modo on peut dire que 5.000 sites ou pages ayant un “ranking” important peuvent arriver à leurs fins assez rapidement en termes de “Google Bombing”. Par contre, si des sites, pages ou blogs ont une “valeur” moins élevée, il faudra qu’ils soient 10.000, 20.000 ou même plus pour réussir, et en plus de temps”.

Les chiffres donnés à la journaliste l’étaient davantage au titre d’une parabole explicative que d’un authentique exemple. De fait, personne n’est capable d’indiquer (même très approximativement) combien de sites sont nécessaires à la fabrication d’une Google Bomb. On sait juste qu’il en faut… beaucoup, et que cela dépend d’au moins deux critères :

  • la cible : Nicolas Sarkozy est, comme Georges W. Bush en son temps, une personnalité à l’empreinte lexicale très forte sur Internet. Les marqueurs et mots-clés qui lui sont habituellement associés (son “champ lexical” si vous préférez) sont, qualitativement très connotés (“président”, “Élysée”, “nabot”, “premier personnage de l’État”, “république”, “hyperactif”, etc.) et quantitativement innombrables (des dizaines de millions d’occurrences). Il est donc très délicat d’inverser la logique de ces marqueurs, sauf à mobiliser une très grosse quantité de sites. À l’inverse, si vous choisissez une cible à l’empreinte lexicale numérique beaucoup plus faible (moi par exemple), il sera, théoriquement, plus facile de mettre rapidement en place un Google Bombing efficace et ce à l’aide d’une communauté de sites participant nettement plus faible que dans l’exemple précédent.
  • la pondération des sites “attaquants” : plus le “pagerank” du site à l’origine du backlink (= le site qui met un lien intitulé trou du cul et pointant vers le site de Nicolas Sarkozy), plus son “pagerank” est élevé, et plus sa prise en compte dans la Google Bombe sera efficacement prise en compte.

Et un gros contresens.

  • Q: Quelle est la politique de Google en la matière ? Interviennent-ils ?
  • R: “Initialement le credo fondamental du groupe, c’est zéro intervention humaine, notamment sur le classement de ses résultats de recherche. On l’a bien vu avec un des premiers cas de “bombing” d’ampleur, celui qu’avait subi George W. Bush il y a plusieurs années : lorsqu’on tapait “miserable failure” (“échec cuisant+” sur Google, le premier résultat de recherche renvoyait sur sa biographie officielle sur le site de la Maison Blanche. Et ce lien est resté en ligne plus de deux ans, Google n’est pas intervenu ! Ils continuent à s’y tenir, alors qu’il est très simple, techniquement, d’éliminer ce genre de liens”.

Vrai : il est effectivement très simple techniquement d’éliminer ce genre de liens. Mais faux : Google ne s’en tient plus à sa politique de laisser faire. Il y eut en fait plusieurs temps dans la gestion du Google Bombing par Google lui-même :

  • après avoir – nous étions alors en 2005 – reconnu et même légitimé a posteriori la pratique du Google Bombing, Google a, dès l’année suivante,
  • utilisé ses propres liens sponsorisés pour s’acheter à lui-même le mot-clé “Google Bombing” et pointer vers la page susmentionnée légitimant cette pratique, pour enfin,
  • le 25 janvier 2007, hop hop hop, mettre au point un changement dans l’algorithme qui hop hop hop toujours, nettoie tout simplement les sites victimes et rien que ceux-là, tout en permettant aux sites qui parlent ou commentent le Google Bombing de continuer d’apparaître.

La vérité est ailleurs.

Sauf à travailler chez Google et à être en charge du dossier, personne ne sait vraiment ce qu’il en est. On peut simplement être certain que :

  • le nombre de Google bombes a effectivement diminué depuis cette annonce (peut-être précisément à cause dudit effet d’annonce) mais la pratique continue d’exister et le Google Bombing est loin d’avoir totalement disparu (le premier trou du cul que vous croiserez vous le confirmera séant).
  • dans le cas d’un Google Bombing, du côté de chez Google, la soudaineté de l’apparition des liens, le fait qu’ils proviennent dans leur grande majorité de sites à faible pagerank, et l’uniformité sémantique des ancres hypertextuelles, le tout conjugué à la formidable réactivité de la puissance de calcul de Google, doit effectivement permettre d’en repérer pas mal et donc de corriger les résultats pour en atténuer la portée (et ce que ce soit “à la main mais sans le dire” ou – ce qui revient au même – par un subtil réglage algorithmique jamais révélé).
  • un certain nombre de sites sont nécessairement considérés par Google comme plus “sensibles” que d’autres, ainsi – probablement – celui de la Maison Blanche, de l’Élysée, etc., et pour lesdits sites, il n’est pas très compliqué de bâtir un index permettant de repérer les requêtes “non-standard” pointant vers eux.

On résume ?

  1. Google ne pourra jamais dire qu’il corrige à la main les bombardements sémantiques en règle (c’est contraire à son “éthique”, et surtout, à son image et donc, in fine, à son business)
  2. Google a théoriquement les moyens de repérer et de corriger ou d’atténuer, en back-office, lesdits bombardements.
  3. Il y aura toujours des Google Bombes parce qu’elles sont consubstantielles à l’algorithme Pagerank dudit Google et que vouloir les supprimer équivaudrait à organiser des élections sans mettre de bulletin de vote à disposition des électeurs. Ce serait certes théoriquement possible, mais ce ne serait pas du plus bel effet et cela se remarquerait assez vite :-)

Bon ben alors y’a quoi d’nouveau dans c’t'affaire ??

Ce qui est nouveau dans l’affaire c’est qu’il s’agit, à ma connaissance, de la première fois que le support de la cible attaquée (Nicolas Sarkozy) n’est pas un site institutionnel (elysee.fr) mais la page “officielle” du premier des réseaux sociaux occidentaux. Plusieurs remarques s’imposent alors :

  • d’abord : sur le glissement de la représentation de l’autorité et/ou, à tout le moins, sur sa domiciliation numérique. Si c’est la page Facebook et non le site élyséen qui fut choisi pour ce bombardement lexical, c’est peut-être par facilité (ledit site elysee.fr étant – cf. supra – assez sensible) mais plus probablement par souci d’efficacité, les 300.427 “fans” de ladite page Facebook constituant autant de potentiels dégâts collatéraux de la bombe envoyée comme message aux mêmes 300.427 “fans”. Pour le dire plus prosaïquement : si tu veux faire, métaphoriquement, “sauter” l’Élysée comme siège du pouvoir, commence par dynamiter la page Facebook de son locataire.
  • ensuite : sur le fait que la densité des liens propre à l’écosystème desdits réseaux sociaux d’une part, et les techniques de dissimulation (et à mon sens d’appauvrissement, mais c’est un autre débat…), les techniques de dissimulation ou de cryptage des liens hypertextes (cf. par exemple les raccourcisseurs d’URL), leur niveau d’enfouissement dans les tréfonds des limbes conversationnelles des mêmes réseaux sociaux, lesquels réseaux fonctionnent de manière fermée (= pour l’essentiel invisibles aux moteurs) mais peuvent s’appuyer sur des interactions conversationnelles constantes qui en font de vraies bombes à retardement sémantiques, cet ensemble de paramètres explique très certainement la réussite de cette dernière Google Bombe visant le premier personnage de l’État.

<Update> Comme me le fait remarque @Palpitt sur Twitter, le site Sarkozy.fr (lui-même victime d’un Google Bombing en 2009), redirige vers la page Facebook de Nicolas Sarkozy. “Il y a dû y avoir un transfert de poids”. </Update>

Quels enseignements en tirer ?

  • le Google Bombing, c’est un peu comme le Yin et le Yang : il s’auto-alimente jusqu’à s’auto-pondérer : plus on en parle, plus les sites s’en font l’écho et plus, d’un côté, ils accroissent le phénomène en lui offrant de nouvelles occurrences, et plus, de l’autre côté, ils l’atténuent, en positionnant d’abord juste après puis juste avant la bombe elle-même les sites en décrivant le mécanisme, contribuant du même coup à la désamorcer.
  • moi j’aime bien le Google Bombing, parce qu’il est l’illustration algorithmique, programmatique au sens premier du terme, que le tout est plus que la somme des individualités qui le composent, parce qu’à la démocratie du plébiscite, aux classements par “popularité” il présente le visage d’un contournement rendu toujours possible celui d’une subversion intrinsèque à toute puissance installée et apte à la faire au moins temporairement et superbement basculer. J’aime bien le Google Bombing parce que même s’il ne brille pas toujours par la finesse de son expression, il fut, à l’origine tout au moins, l’expression d’une grande finesse dans la compréhension des mécanismes qui régissent ceux qui règnent aujourd’hui sur l’empire des mots du web.

P.S. : concernant la réaction de Google, je vous renvoie à la précédente dépêche AFP sur le sujet dans laquelle la firme indiquait : “Nous ne soutenons pas cette pratique, ni aucune autre visant à altérer l’intégrité de nos résultats de recherche, mais en aucun cas cette pratique n’affecte la qualité générale de notre moteur de recherche dont l’impartialité reste, comme toujours, au centre de notre action“, a souligné Google.

<Update> Ce mercredi 8 septembre, la bombe a été désamorçée par Google. Ne figurent plus que les sites faisant mention du Google Bombing. </Update>

Billet initialement publié sur Affordance

Image CC Flickr Urban Jacksonville

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http://owni.fr/2010/09/15/de-qui-trou-du-cul-est-il-le-nom-eloge-dun-bombardement-semantique/feed/ 2
S’il te plait google, je veux pas être partout chez toi http://owni.fr/2009/11/08/s%e2%80%99il-te-plait-google-je-veux-pas-etre-partout-chez-toi/ http://owni.fr/2009/11/08/s%e2%80%99il-te-plait-google-je-veux-pas-etre-partout-chez-toi/#comments Sun, 08 Nov 2009 15:59:32 +0000 Admin http://owni.fr/?p=5313 Sur son blog, Rémi s’interroge sur les mécanismes de référencement de Google par rapport aux traces associées à son nom. Il nous fait part de sa propre expérience à ce sujet, et en plus, il fait des jeux de mot.

Le web social, c’est l’interaction, l’échange entre les utilisateurs d’un même site. Le Web social permet de partager son savoir, son expérience, ses sentiments. Le web social, c’est le présent, et l’avenir.
Le web social, ce sont des outils, simples à utiliser, pour entrer en relation avec l’autre.
Le web social, c’est un nom, un pseudonyme, une identité qui véhicule une image, notre image, sur un espace de discussion.

Je me suis longtemps caché derrière un pseudonyme avant d’utiliser mon prénom et mon nom sur internet. J’ai mis longtemps à assumer cette identité numérique. Désormais, sur internet, j’existe, et je souhaites exister.
Alors je m’exprime, je réagis, je débat.
Parfois, je fais des blagues salaces. Parfois, je fais des remarques pertinentes. Parfois, je rentre en contact avec des prospects, et peut être que parfois, je croise mon futur employeur.

Mais souvent, tout le temps, je laisse une trace. RemiB par ci, RémiB par là. A chaque mot envoyé sur la toile, j’associe mon nom ..

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